Du samedi 23 septembre au dimanche 5 décembre 2023 à la Galerie Juvénal
Vernissage le vendredi 22 septembre 2023
Étendue proche… pour une expo en duo, le titre déjà est à double sens. Selon qu’étendue sera adjectif : qui donc est étendue là, proche, à portée de main peut-être ou de désir ?… Ou selon qu’étendue sera substantif: quelle est cette étendue pas si éloignée que cela, à perte de vue ou à portée de marche ? À moins bien sûr qu’il ne s’agisse en quelque sorte des deux : paysage et personnage étendus, mais aussi entendus et confondus ; ou le paysage considéré presque comme un personnage, dont on pourrait avec minutie et douceur brosser le portrait. D’emblée en tout cas on perçoit qu’il sera là question d’un beau rapprochement et d’intimité, de sensibilité ou de sensualité.
Né en 1979, le photographe Pierre Rahier vit à Thon, près de Namur. Proche de la jeune scène photographique émergente de la région, il a exposé beaucoup — mais essentiellement dans le Namurois… Quant aux sujets de ses deux séries principales (« Le silence de la vallée », montrée ici, et… « Namur ! »), ils ne font que renforcer l’impression d’attachement, d’enracinement qui se dégage de son univers, pourtant singulier à maints égards et comme flottant. Portraits des enfants ou de la compagne, lieux de vie dont on ne sait si c’est au quotidien ou pour une nuit, impressions au soleil couchant ou levant, dans des ambiances qui n’ont rien de la carte postale mais savent se faire discrètement mystérieuses et silencieuses, aux aguets de ce qui frémit — ou pas — dans un ciel, une écorce, un feuillage ou sur un visage. Attaché au support livre (déjà primée à plusieurs reprises, la maquette de son ouvrage sera publiée par les éditions du Caïd), Pierre Rahier met ici, pour la première fois un peu plus en aval, une sorte de point final à une chronique et une recherche étalées sur plusieurs années…
Né pour sa part en 1995, l’artiste plasticien Dimitri Fagnoul, établi lui aussi dans des paysages peu éloignés de Huy, aime à citer André Masson: « Dans l’art il n’y a ni formes ni objets. Il n’y a que des surgissements, des événements, des apparitions. » C’est dire s’il accorde plus d’importance à la vibration qu’à l’explication, dans un travail qui tient à la fois de la poésie et de la musique, où chaque touche joue sa partition, chaque ligne, forme ou couleur a sa valeur propre: « Mon travail passe tout d’abord par l’observation et l’attrait pour la poésie de certaines lignes, certaines valeurs ou couleurs », précise l’artiste. « J’éprouve la nécessité de traduire une force, une énergie qui provoque quelque chose chez moi et qui surgit de ce que j’observe. Le carnet de croquis est un élément essentiel car j’y enregistre mes observations avec tout type de notes qui me permettent de (…) comprendre ce qui m’entoure. Ces carnets m’accompagnent partout, du plus petit trajet pour aller travailler jusqu’aux randonnées de plusieurs jours. »
Au fusain ou à l’huile chez Dimitri Fagnoul, en grand format ou plus souvent dans le détail, en couleur ou en noir et blanc, le travail précis vient ponctuer ici le récit plus allusif et brumeux de Pierre Rahier, ses grandes envolées ou ses recoins d’ombres, ses nuances et ses contrastes.